Aujourd’hui le cabinet Audonia
fête ses six ans d’activité.
Je me suis dit qu’il fallait
partager cet événement avec ceux qui me contactent via le blog.
Je me suis ainsi rendue compte
que le dernier article date du 30 décembre 2015. Plus de 1 an et demi
d’absence du blog ! Il est temps de reprendre cette partie de mon
activité car, malgré ce silence, le cabinet Audonia n’est pas du tout en time
off, bien au contraire !
Quoi de neuf alors. Tout d’abord l’augmentation
du nombre de consultations, de formations en entreprise, de conférences fait que le temps que je peux dédier à l’écriture s'est réduit.
J’ai aussi choisi de vivre une nouvelle
expérience de vie dans un nouveau pays. Je me suis installée près de Londres et je me
déplace donc beaucoup pour mes consultations et mes formations entre la France
et l’Angleterre, le Luxembourg et l’Italie.
Une semaine sur deux je suis en
Angleterre où je prends régulièrement des cours d’anglais, je découvre ce
beau Pays et cette belle culture. Le but étant de mieux maitriser la langue anglaise , proposer mes formations aussi en anglais et de ce fait élargir mon
champ d’intervention et augmenter le nombre de formations.
Depuis avril 2016, j’ai aussi le
plaisir de travailler, en tant que project manager pour la France, au projet
européen BIC (Bullying in Institutional Care). Il s’agit d’une étude dédiée à
la prévention et au traitement du harcèlement entre enfant en institution et à
l’école. Je parlerai de ce beau projet dans un prochain article.
Voilà en bref les raisons de mon
absence sur le blog.
Je souhaite reprendre de manière
régulière la publication des articles et partager les résultats de ces
nouvelles expériences professionnelles.
Toutes les personnes que j’ai eu
le plaisir d’accompagner m’ont, au travers du partage de leurs expériences,
beaucoup appris. Le contact avec ces êtres blessés, au grand cœur et porteurs
de valeurs, qui ont choisi de partager avec moi leurs histoires, leur détresse,
leurs sentiments, m’a nourri. Leur envie de sortir de cette folle emprise échafaudée
par le biais de la perversité d’un être qu’ils ont croisé sur leur chemin ou qui
était dans leur vie par le lien familial, m’a motivé dans les moments de doute.
Je les remercie tous pour leur confiance.
Au moment où j’écris cet article,
durant un énième vol dans un anonyme avion, je pense à toutes ces personnes que
je ne peux pas nommer par discrétion mais que je remercie profondément.
C’était à l’occasion d’un de mes
derniers entretiens, qu’une jeune femme m’a suggéré l’idée de résumer en
quelque ligne les conseils, les plus basiques pour se protéger de la manipulation et sortir de l'emprise de la perversité.
Avant de me lancer dans
l’écriture de cet article, quelque précision s’impose.
Tout d’abord je tiens à souligner
le fait que je préfère utiliser l’expression
« manipulateur/manipulatrice » plutôt que celle de pervers ou
perverse narcissique. L’expression pervers narcissique est une expression issue
de la psychiatrie. Officiellement seuls les médecins
psychiatres peuvent identifier une personne comme porteuse de ce trouble du
comportement. Les autres poseraient un diagnostic que n’ont pas le droit de
poser.
J’ai eu dans mon cabinet des
clients qui étaient déjà passé par des consultations psychiatriques durant
lesquelles le diagnostic n’avait pas (par précaution !) été posé.
Je tiens à préciser ainsi que, souvent,
dans les écrit le mot manipulateur ou
pervers est utilisé uniquement au masculin. Ce qui génère encore l’idée
largement préconçue que la manipulation ou la perversité serait un mode de fonctionnement
qui appartiendrait uniquement aux personnes de sexe masculin et, j’ajouterais, hétérosexuel.
Mon expérience sur le terrain me prouve
que cela n’est pas vrai. J’ai pu constater que le nombre de pervers homme n’est
pas supérieur à celui des femmes. Parfois je me demande si ce n’est pas le
contraire. J’ai déjà eu occasion d’écrire sur les mères toxiques, un grand
sujet qui ne cesse pas d’être creusé.
Même si parfois l’utilisation des
mots au masculin et au féminin peut rendre le texte moins fluide à certains
passages, je considère important de continuer à le préciser.
Tout ce que j’écris est le fruit
de mon expérience, de ce que j’ai pu constater en six ans de travail quotidien
avec les victimes. Ce que je déduis des connaissances acquises grâce à mes études
en psychosomatique, en victimologie, en droit et à toutes les formations que j’ai
suivi durant cette période.
Mes 10 conseils pour se protéger de la perversité et sortir de l’emprise
1) Les
identifier :
Le mot pervers, aussi démonisé et
interdit d’utilisation, n’est rien d’autre que l’évolution du verbe latin « perverto» qui traduit signifie
« renverser, retourner, mettre à l’envers» ou encore « détruire,
abattre, ruiner, bouleverser ». Le pervers (je me permets d’utiliser cette
expression à des fins uniquement linguistiques !) retourne donc la
réalité, rendant les autres aveugles, pour les dominer et si possible les détruire.
Dominer, c’est le mot clé. Le pur
et simple besoin compulsif de dominer.
Dans le but d’exister dans les
coins les plus intimes de la vie d’une personne, envahissants et sans limites, ils
ne se privent pas de jouer un grand rôle lors de la rencontre, si rencontre il
y a eu, ou de manière régulière et cyclique dans le quotidien des relations
familiales.
Les articles sur le sujet qui livrent des conseils pour identifier
un manipulateur ou une manipulatrice publiés sur les sites, les réseaux sociaux
ou les magazines sont nombreux.
Parfois trop superficiels, certaines
écrit ont contribué à la banalisation de la notion de perversité en la rendant
presque une étiquette à la mode. Probablement vous êtes tombés sur cet article
parce que vous avez tapé dans votre moteur de recherche « comment
reconnaitre un manipulateur » ou expressions similaires.
Certains auteurs, au contraire,
ont fait un travail remarquable en matière.
Comme le docteur Marie-France Hirigoyen,
que j’ai eu le plaisir de rencontrer lors d’une conférence au Luxembourg, il y
a quelques années. C’était un honneur pour moi de discuter avec cette femme extraordinaire
qui a, dans les années 90, divulgué au grand public les mécanismes de l’emprises
psychologique au travers de ses nombreux écrits (pour en citer les plus connus :
« Femmes sous emprise », « Le harcèlement moral », « Le
harcèlement moral dans la vie professionnelle »).
Parmi les nombreux tests proposés
pour reconnaitre une personnalité manipulatrice, le plus pertinent, le plus
complet, à mon avis, est celui des « 30 critères » de Isabelle
Nazare-Aga également contenu dans le livre « Les manipulateurs sont parmi
nous » qui reste pour moi une référence en matière. Je conseille la
lecture de cet ouvrage à tous ceux qui me consultent.
Si une personne décide de faire
des recherches sur les sites dans le but de trouver des pistes pour identifier
une personnalité manipulatrice, c'est parce qu'il/elle a probablement des doutes, ou juste besoin de
confirmation de ces doutes.
Vous en avez entendu parler, vous
vous posez des questions sur la vraie nature de cette séduction qui s’alterne à
la déstabilisation, au dénigrement, à la violence verbale la plus cinglante et
qui provoque à la fois un fort sentiment de culpabilité et un puissant besoin
de justifier la personne qui en est à l’origine.
Les agissements communs à tous
les manipulateurs/manipulatrices ne sont pas très nombreux, on en parle beaucoup.
On peut citer: séduction, dénigrement, incapacité à se remettre en question (sauf
si « s’excuser » leur permet, par stratégie, d’obtenir un avantage),
tentatives (la plupart du temps réussies) d’isolement de la famille et des amis, répondre dans le flou, rejeter
la faute sur les autres, changement de comportement selon les situations, déni
de la réalité, besoin compulsif de gâcher les beaux moments, menaces,
chantages, critiques systématiques (il y a toujours une bonne raison pour que
ça n’aille pas), maniement parfois redoutable de la rhétorique (un quelconque
sujet abordé se retourne contre nous), indifférence au besoins et aux désir des
autres, ……
On parle moins de la possibilité que cette reconnaissance se fasse au travers de ce que ces agissements provoquent
chez ceux qui les subissent.
Nous pouvons bien évidemment
reconnaitre un manipulateur ou une manipulatrice uniquement par le biais de l’analyse
de ses comportements mais à conditions d’avoir la juste distance pour en
déduire la juste stratégie à mettre en place.
Dans la plupart des cas, au
moment où on analyse ces comportements, cette juste distance n’est pas encore intégrée.
Elle peut se déclencher
rapidement mais parfois un profond sentiment d’inaptitude et de culpabilité envahit
les personnes confrontées à ces situations.
"Si en lisant toutes ces
caractéristiques je devrais être en mesure de reconnaitre la nature perverse de
la personne que j’ai en face et je n’y arrive pas c’est parce que je n’ai pas
les capacités nécessaires pour y arriver".
C’est un gaspillage d’énergie et
de temps qui épuise, une double culpabilisation.
"Non seulement je l'ai cherché en plus je n'arrive pas à m'en détacher. Je suis vraiment un/une incapable, il/elle avait raison"
Tenter de reconnaitre la vraie
nature de ces êtres au travers de ce que ces comportements provoquent en nous
peut se révéler un exercice intéressant car il nous met face à l’obligation d’accepter
que tout ressenti est « légitime » et si une émotion, une réaction est
là c’est parce que nous appartient et en tant que telle nous pouvons la percevoir comme « légitime ».
Il est incontestable que les êtres humains sont tous différents (ça n'a pas le même sens pour les personnalités manipulatrices) mais j’ai pu constater que les réactions et les ressentis face aux
agissements de manipulation les plus connus, ceux que j’appelle « les
caractéristiques de base », le fil rouge qui fait que tous les
manipulateurs se ressemblent, sont très similaires chez toutes les « victimes ».
Je pense que comprendre que le
lien entre cause et effet n’est pas la conséquence d’un défaut ou une incapacité appartenant à celui ou celle qui a subi l'emprise est
un passage fondamental auquel il faut donner priorité.
Notre système psychique peut être
épuisé face au comportement malsain de quelqu’un d’autre, car il se protège
comme il peut. Personne n’est à l’abri d’une
emprise psychologique.
Je prends à exemple ce sentiment
de sidération face à certaines remarques. Pourquoi sommes-nous sidérés et
incapable d’avoir de la repartie face à cette personne et non pas face à une
autre ? La même remarque provenant de quelqu’un d’autre nous ferait réagir
autrement ? En général les manipulateurs/manipulatrices font partie de
ceux qui nous rendent incapables de réagir ou d’agir.
Ou encore, après avoir discuté
avec eux, pour des raisons différentes, certaines personnes nous laissent avec le sentiment d’avoir subi un'injustice profonde. Nous ressentons alors un particulier besoin d’en
parler. C’est un peu comme un état de stress post traumatique. La réminiscence
de l’événement peut devenir envahissante au cours de la journée et nous avons un
besoin profond d’en parler, dès que l’occasion d’introduire le sujet se présente
ou nous faisons en sorte de la créer cette occasion.
Pour aborder un mécanisme très connu, dans les relations de couple, en
début de relation, malgré la séduction et donc le fait que cette personne répond
exactement à nos critères de rêve, nous ressentons toujours un « bémol ».
« Je voulais la/le quitter après quelque temps, mais j’étais vite engagé/e », « Je
n’aimais pas son odeur de peau mais je n'ai rien dit», « Je me sentais mal à l’aise même
au début quand on rencontrait mes amis, on a fini pour voir uniquement les siens »….mais…nous sommes restés.
Au début de la relation, ce que
l’on peut appeler un « ancrage émotionnel » s'installe. Une sorte de
noyau qui s’accroche à l’intérieur de notre monde émotionnel et que nous
n’arrivons plus à faire bouger. La sensation de remplissage d’un vide, quelque
chose de sécurisant, se génère.
Et c'est cet ancrage qu'ils réveillent de tant en tant, dans les périodes de calme, ce moments que Leonor Walker dans sont étude "The Battered Woman", publiée en 1979, appelle les phases de "Lune de miel".
Ils doivent ressentir une
jouissance extrême en voyant la proie choisie sur la point de tomber dans le
filet ! Et ils ne le cachent pas. Mais nous pouvons comprendre cela
seulement après avoir fait le travail de « prise de distance ».
Marie-France Hirigoyen a dit que
l’emprise « se situe autour des perceptions minimes ». Je trouve
cette expression extraordinaire.
Les perceptions les plus
subtiles, celle qui sont dans les couches les plus profondes de notre
psychisme. Nos besoins profonds et nos valeurs sont pris en otage dans ce jeux
pervers.
Jusqu’à faire croire à leurs
proies que rester sous l’emprise relève de leur choix.
Les personnalités
manipulatrices ne peuvent pas imaginer toutes les stratégies que nous avons à
disposition pour choisir de ne pas être sous aucune emprise.
Mais ça, je le partage en secret !
Prochain article : 2) Faire le deuil d’une communication normale
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